Sur le casting en GN : discussions sur le réalisme

Publié le lundi 26 octobre 2015 dans Humeur

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Une fois n’est pas coutume, je m’éloigne du ton académique pour vous livrer une réflexion personnelle et encore en cours sur la répartition des rôles dans un GN. Cette réflexion, et les conclusions que je tire aujourd’hui, ne manqueront pas je pense de faire naître des discussions, en espérant qu’elles soient enrichissantes pour tout le monde.

Tout a commencé par une rencontre. Puis une deuxième, puis une troisième. Chaque rencontre entraînant son lot de discussions et de remises en question. Avant, comme beaucoup d’organisateurs et organisatrices de GN sans doute, je répartissais les rôles de mes GN en fonction du sexe des joueurs : les joueurs incarnaient les personnages masculins, les joueuses incarnaient les personnages féminins. À dire vrai je ne me posais même pas de questions. C’était normal, naturel. Parfois, si vraiment je n’avais pas le choix, je pouvais envisager de donner un rôle masculin à une joueuse, mais cela restait exceptionnel.

Avec d’autres, sur des forums consacrés au GN, j’ai participé à des discussions et des débats sur le casting. Ce que j’appelle casting ici c’est la répartition des personnages selon les joueurs et joueuses inscrits. Une idée revenait régulièrement, celle du réalisme et de la crédibilité. Certains organisateurs et organisatrices  (dont je faisais partie) avaient une exigence sur le rendu visuel de leur GN, et par conséquent écartaient des joueurs ou des joueuses de certains rôles sous le prétexte du réalisme. Non, cette joueuse ne peut pas jouer ce personnage masculin, ce n’est pas crédible ; non, ce joueur gringalet ne peut pas jouer un barbare, ce ne serait pas crédible ; non, ce joueur pas très beau ne peut pas jouer le rôle du Dom Juan de service ; non, cette joueuse noire ne peut pas participer à mon GN historique, ce n’est pas réaliste… Si certains de ces exemples passent sans problème dans la communauté, certains provoquent des débats à raison puisqu’ils ont trait à une réelle discrimination. Or, dans la mesure où certaines discriminations ne sont pas tolérables dans notre pratique, pourquoi passons-nous aisément sur de nombreuses autres sous le prétexte qu’elles sont communément admises ?

Gn Carmen Chabardès eXperienceJul avait 43 ans quand il a incarné le personnage de Paul, un jeune garçon de 12 ans.

Du réalisme en GN

Nos GN ne sont pas réalistes. Même le jeu le plus ambitieux, recherchant au maximum l’illusion à 360°, nécessite de la part des participants de faire abstraction. En tant que joueurs et joueuses notre capacité d’abstraction est particulièrement développée. C’est elle qui nous permet de considérer que ce type déguisé n’est pas un GNiste avec un masque en latex (ce qu’il est), mais un orque. C’est elle qui nous permet de considérer que cette joueuse rousse à la peau blanche est une égyptienne, ou que ce joueur qui grignote au buffet est un vampire immortel.

Le réalisme de nos GN est une illusion. Un simple coup d’œil aux photos d’un GN historique suffit à nous le montrer : les costumes portés par les joueurs et joueuses n’ont la plupart du temps rien de réaliste. Plus encore, l’écriture même de nos GN n’est pas réaliste. Même pour ceux qui le recherchent au maximum et dont je fais partie, nous ne faisons que proposer une réalité alternative, qui peut être distordue à l’envi en fonction de nos besoins de scénaristes.

Ainsi, comment peut-on encore se cacher derrière cette excuse du réalisme au moment de faire un casting ? C’est la question que je me pose aujourd’hui et qui m’amène progressivement à modifier ma façon de considérer la répartition des personnages de mes jeux.

jeu de role grandeur nature pour enfantMalgré le meilleur costume du monde, non, les elfes n’existent pas.

La question du genre

Très récemment j’ai eu envie de proposer une session inversée de mon GN Carmen Chabardès (la première session de ce type devrait avoir lieu à l’automne 2016 et est en cours d’organisation). Le jeu traitant en partie de la condition de la femme dans la famille bourgeoise au début du XXe siècle, il me semble intéressant de proposer aux joueurs d’expérimenter cette condition du point de vue des personnages féminins et de faire vivre aux joueuses un statut qu’elles n’ont probablement jamais expérimenté non plus en leur faisant jouer les personnages masculins. Si certains joueurs et joueuses n’ont pas le désir de faire ce genre d’expérimentations, ce que je peux aisément comprendre, j’ai rencontré un enthousiasme teinté de crainte de la part de nombreux joueurs. Beaucoup m’ont répondu que cela les intéressait beaucoup, mais qu’ils craignaient de ne pas être très crédibles. Cette crainte, que je peux également comprendre, m’a frappée tant elle relève de préjugés bien ancrés dans le milieu et par extension dans la société.

mad-about-the-boy-nordic-larp-Thomas jouait une femme sur l’une des sessions nordiques de Mad about the boy

Nous faisons du GN pour nous emparer de différentes personnalités par le biais des rôles qui nous sont proposés. Notre plaisir de joueurs et de joueuses est de nous glisser dans la peau d’un personnage et de le faire exister pendant un temps donné. Puisque notre capacité d’abstraction est réelle, puisque nos jeux ne sont pas réalistes et que nous le savons, pourquoi ne pourrions-nous pas jouer indifféremment selon le genre du personnage ? Pourquoi devrais-je avoir plus de difficultés, moi, en tant que joueuse, à incarner un rôle masculin dont la personnalité s’approche de la mienne, plutôt qu’un rôle certes féminin, mais dont la personnalité est diamétralement opposée à ce que je suis et peux jouer ? Un personnage n’est-il pas d’abord une personnalité, des traits de caractère, une histoire qui lui a permis de se construire avant d’être un corps et un genre ? Bien sûr le corps a son importance dans la perception que l’on peut avoir d’un individu ou que l’individu peut avoir de lui-même ! Mais le jeu de rôle grandeur nature a cela de merveilleux qu’il nous propose un grand nombre d’outils pour faire ce que l’on veut comme on le veut. Des outils, comme les ateliers de création de personnages, comme les règles imposant des attitudes particulières dans certaines situations, qui peuvent nous permettre de dépasser les limites imposées par la société.

Je crois que c’est un acte militant aujourd’hui de permettre à un joueur ou une joueuse de jouer le rôle qu’il désire quel que soit son genre ou ses caractéristiques physiques et je crois que c’est une position que je veux prendre. Militant parce que ce petit acte qui n’a l’air de rien (caster un homme dans un rôle de femme ou une femme dans un rôle d’homme) peut contribuer, s’il venait à se généraliser, à modifier notre perception de ce qui est “normal”, contribuer à ce qu’en lisant un personnage ou mieux encore, en parlant à un interlocuteur, on ne voit plus en premier lieu un homme ou une femme, mais un individu, une personnalité unique dont le genre n’est qu’une composante parmi beaucoup d’autres. Les loisirs sont peut-être les premiers bastions pour les transformations sociétales qui nous tiennent à cœur et il me semble que ce détail du casting est la première pierre posée à l’édifice de l’égalité.

SONY DSCSaki a joué un homme sur sa session des Fleurs de Mai

Je pense et j’espère que les sessions aux genres inversés vont se développer dans l’avenir (une session inversée du jeu Still Water Runs Deep de Marianne est d’ailleurs prévue fin mars), mais je pense aussi que ces sessions ne seront pas suffisantes et que c’est le mélange généralisé qui seul pourra contribuer à ce que dans quelques années un homme ou une femme pourra jouer indifféremment n’importe quel personnage. À nous, créateurs et créatrices de GN, de réfléchir aux outils nous permettant de rendre cela possible. Une perspective que je trouve particulièrement enthousiasmante.

J’espère que ce billet d’humeur vous invitera à la réflexion et pourquoi pas à la remise en question de votre pratique de la répartition de personnages, et je vous propose d’entamer la discussion dans les commentaires.

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Lucie CHOUPAUT

Présidente de l'association eXperience, Lucie s'intéresse aux rapports entre GN et art. Ses goûts d'organisatrice et de joueuse la portent plus particulièrement vers des jeux expérimentaux d'ambiance contemporaine et réaliste.

94 réactions à Sur le casting en GN : discussions sur le réalisme

  1. Très intéressante réflexion.
    Et puisque tu proposes de continuer ici la discussion :
    Je pense qu’on a dépassé la recherche de “réalisme” pour aller vers la “cohérence”, et surtout que celle-ci ne passe plus uniquement par le sens visuel : on ne choisit plus obligatoirement le culturiste pour incarner un Conan, mais on attend à ce qu’il compense, si c’est une ablette, par une attitude ad-hoc. Et il en va de même pour le personnage séducteur, inquiétant, etc. Même s’il reste des limites, par exemple pour des personnages très charismatiques. Du coup, on fait plutôt abstraction des couleurs de peau, mensurations et critères de beauté, et c’est plutôt bien.
    Pour autant, le sexe est selon moi le plus difficile. Outre la transformation physique, la restitution du caractère n’est pas évidente, d’autant plus si on veut éviter l’outrance, d’autant plus si le contexte du jeu est très particulier pour un des deux sexes. En ce qui me concerne, j’ai le sentiment que c’est pour moi la couche de méta-jeu de trop : me concentrer sur un jeu féminin juste, avec un corps qui m’est inconnu, et en plus intégrer le fait que le rugbyman barbu en face de moi est en fait la jeune et fraîche fille de la famille.

    Enfin, si j’ai bien compris, mais Marianne tranchera certainement, la session inversée de Still Water Runs Deep ne prévoit pas de travestissement mais ce sont les contraintes et caractères sexués qui seraient inversés, ce qui me semble très intéressant.

  2. Bravo Lucie pour cette réflexion qui continue de nombreuses discussions et qui peut proposer d’intéressants développements de notre loisir…
    Pour te répondre, Moz, in fine nous avons décidé d’inverser les joueurs et non les rôles : les femmes joueront des persos masculins et vice-versa, le travestissement est prévu (mais sera geré en amont du jeu), les ateliers porteront sur comment investir un genre autre que le sien, à une période différente de la sienne, le but étant d’explorer effectivement les contraintes et caractères sexués qui ne sont pas ceux du joueur.

  3. 3 points qui m’ont fait craindre l’incarnation d’un rôle féminin.

    – L’exigence du jeu.
    Carmen Chabardès m’apparait comme un jeu exigent (ce qui en soi est une qualité). Par de nombreux aspects il amènera irrémédiablement la peur d’être jugé pour ce que l’on est durant le jeu, en tant que joueur. Venir y interpréter un rôle féminin est sans aucun doute une difficulté supplémentaire, un pas de plus dans cette zone floue qu’est notre zone de confort, donc de mise en danger personnelle. Incarner une femme sur ce jeu ajoute donc un niveau supplémentaire de tension préalable.

    – La perception des rôles féminins de Carmen Chabardès ET la thématique “place de la femme dans la bourgeoisie du XXeme”.
    Il s’agit là sans doute d’un parti pris ou d’un biais de lecture, mais leur incarnation m’apparait comme plus difficile. La fiche de personnage collective fait apparaitre énormément de non-dit, de brimades, de respect de principes, de frustrations, qui nécessitent une certaine finesse d’appréciation et donc de jeu. Il m’apparait plus facile de me rapprocher d’un personnage masculin ET ayant un dilemme moral qui pourrait se retrouver (en partie) de nos jours (exemple du personnage d’Ernest avec la question de la reconnaissance paternelle).

    – Sexe et genre.
    C’est un voeux pieux que celui d’un monde qui dissocierait ces deux notions aisément. A ce jour, ce n’est pas encore le cas. S’il est possible de créer une micro-société, le temps d’un GN, qui rendra cette réalité caduque, ça sera formidable. Cependant le lundi suivant, je retournerais travailler en pantalon, pas en jupe. Quand bien même j’en aurais envie. Parce que ces codes, discutables, existent de manière plus durables que ce jeu.

    Bref, les freins du côté “joueur” me semble plus venir d’un soucis de crédibilité que de réalisme. Les termes sont proches, mais le phénomène me semble d’avantage lié à la crainte d’être hors-propos ou d’être jugé sur son interprétation que de profonds préjugés sociaux.

  4. Merci Lucie d’avoir lancé ce débat intéressant !

    Concernant le fait de permettre à n’importe qui de jouer n’importe qui, y compris un personnage de sexe opposé, j’y vois clairement un avantage et un inconvénient :
    – d’un côté, ça permet effectivement à n’importe qui de jouer n’importe quel personnage, ce qui est super ;
    – d’un autre côté, plus il y a d’écart entre le joueur et le personnage, plus ça demande un effort d’abstraction à tout le monde.

    Ca revient donc, à mon avis, à un choix entre la liberté qu’on donne aux joueurs d’incarner le personnage qui leur plaît, et la contrainte qu’on impose à tout les autres joueurs. Chaque organisateur place le curseur où il le souhaite entre liberté/inclusion/effort d’abstraction d’un côté, et absence d’abstraction de l’autre.

    Tu soulignes, à juste titre, qu’on surmonte bien des contraintes d’abstraction dans la plupart de nos GN (on ignore la rubalise, l’extincteur, le costume historiquement approximatif, les épées en latex, les lunettes, la couleur de la peau, le charisme ou le talent artistique défaillant, etc.). On peut donc très bien également surmonter le sexe du joueur (et plusieurs GN l’ont prouvé), au prix d’un effort d’abstraction supplémentaire. A chaque organisateur de faire son choix, en connaissance de cause.

    PS : J’en profite pour rappeler qu’on peut aussi très bien créer des personnages sans sexe prédéterminé, et dont le sexe sera celui du joueur qui l’incarne. Créer des personnages au sexe prédéterminé n’est nécessaire que lorsque le sexe du personnage a un réel impact sur le jeu, ce qui n’est pas si souvent le cas que ça (ça paraît évident, mais ça ne fait jamais de mal de le dire ^^).

  5. Débat enrichissant en effet. Et je suis assez d’accord avec ce qu’écrit Hoog.

    Voici néanmoins un point de vu plus personnel : l’abstraction est la base même du jeu de rôle sur table. Personnellement je continue cette pratique ce qui me permet de jouer ou faire vivre des univers très différents de notre réalité. On passe plus facilement à des rôles “contre nature” dans ce format de jeu.

    Du coup je recherche dans les GN autre chose : une cohérence visuelle, une forte immersion, une tentative de créer une illusion à 360° (malgré l’impossibilité d’y parvenir complètement). Du coup mon approche, aussi bien en tant que joueur qu’orga, est assez classique, je dois en convenir. Je ne suis clairement pas intéressé de jouer à des jeux demandant une trop forte abstraction visuelle : j’en ai marre de ces GN en tente Quechua, de ces cabanes qu’il faut voir comme un château. Et je ne veux pas jouer dans un jeu où le visuel d’un joueur n’est nullement en lien avec son personnage.
    Je suis pour coller au maximum avec une dimension visuelle cohérente et la plus réaliste possible. Et oui, je demande une photographie pour faire un casting. Est-ce discriminatoire ? Chaque choix l’est. Choisir c’est renoncer. Car au final, quand tu recevras 50 préinscriptions pour faire un GN avec 20 joueurs, il te faudra faire un choix. Il ne sera plus basé sur des éléments physiques, sexués, mais se fera bien sur des dimensions, plus ou moins consciemment, discriminatoires.
    Car au final, le seul casting qui n’est pas discriminatoire c’est le tirage au sort !

  6. Un avis un peu différent de Lucie sur le casting. Ce qui est recherché il me semble, ce n’est pas le réalisme (qui a forcément ses limites parce que comme précisé les elfes n’existent pas), c’est la crédibilité. Dans l’objectif de faciliter le jeu, l’immersion dans le rôle, on utilise différentes techniques dont par exemple les décors 360, des fiches longues, des ateliers préparatoires…
    La capacité du joueur / joueuse a être crédible dans son rôle va aider les autres joueurs dans leur propre rôle. Telle joueuse de 45 ans peut être crédible pour jouer la jeune fille sortant du couvent, pas telle autre de 20 qui sera par contre plus crédible dans le rôle de la mère de famille.
    Le sexe du joueur vs sexe du personnage repose sur le même soucis de crédibilité. Certains joueurs peuvent être crédible dans un rôle de personnages d’un autre sexe que le leur, d’autre non. Et leur propre confiance dans leur capacité à être crédible dans ce rôle importe dans cette crédibilité

  7. Pour avoir commencé à dégenrer mes jeux (pour lesquels il est nécessaire que les personnages soient genrés), je peux témoigner que la majorité des participants demandent encore à jouer leur propre genre, précisément par soucis de ne pas être crédible, ou par confort de jeu. Lorsque la question se pose, l’enjeu repose sur deux niveaux:
    – un joueur estime qu’il a les capacités d’être crédible à jouer un autre genre, et préfère vraiment un personnage d’un autre genre. Le refuser, en tant qu’orga, revient au même que refuser un rôle de leader à un joueur jugé pas assez charismatique. C’est le droit de l’orga le plus strict, mais ça reste une forme de discrimination. Bien évidemment, on en fait tous, et l’orga reste souverain. Néanmoins, pour cette exclusion comme pour d’autre, cela vaut la peine de se demander si cela est vraiment nécessaire.
    – les autres joueurs qui argumentent que leur capacité d’abstraction serait à la peine s’ils étaient face à des personnages joués en rôle inversé. Cela me parait lié au fait que l’on évolue dans une société où le paradigme est encore d’assigner par trop de caractéristiques genrées aux individus (et en hiérarchisant bien évidemment ce qui est jugé comme des codes ou des valeurs du “masculin” ou du “féminin”) Et tout effort pour appuyer le fait que ces perceptions restent relatives me paraît important.

    Merci Lucy pour l’article

  8. “, s’il venait à se généraliser, à modifier notre perception de ce qui est « normal », contribuer à ce qu’en lisant un personnage ou mieux encore, en parlant à un interlocuteur, on ne voit plus en premier lieu un homme ou une femme, mais un individu, une personnalité unique dont le genre n’est qu’une composante parmi beaucoup d’autres. Les loisirs sont peut-être les premiers bastions pour les transformations sociétales qui nous tiennent à cœur ”

    Je ne sais pas si je fais une erreur de lecture/compréhension mais je suis assez étonné par ces propos . Mélangez vous donc le combat de société ( la théorie du genre semble vous tenir à cœur ) et le Gn ? Le Gn est avant tout un loisir et pas une arme/vecteur d’idée visant à changer les autres….

  9. @Thepimousse

    Et les jouets pour garçons en bleus ? Et les jouets pour filles en roses ?

    Le loisir peut être vecteur d’idée, il l’est la plupart du temps et c’est un effort pour faire en sorte qu’il ne soit pas accentué.

    Et oui, les GNs (JEUX DE RÔLES) sont des supports parfaits pour vivre d’autres expériences. Sinon pourquoi est ce qu’on y jouerait ?

  10. @The pimousse

    Je sais pas pour toi, mais j’ai du mal à m’amuser dans un GN reproduisant les clichés de genre et de façon plus général les schémas oppressifs qui m’énervent dans la vraie vie. Justement, je veux que mon loisir soit un loisir, un cadre sécurisant, safe, dans lequel je peux jouer, sans être parasitée par des clichés sexistes, racistes ou autre. Parce que ça m’amuse pas.

  11. bah moi je vais faire partie des vieux réac. Si je trouve intéressant que des jeux s’interroge sur le genre et permettent de faire des sessions inversés, je n’ai pas du tout envie que cela se répande à l’ensemble du gn. Je fais du gn pour avoir le moins d’abstraction possible à faire. Plus je dois faire abstraction de quelque chose, plus ça nui à mon immersion, moins je m’amuse. Si je voulais tout imaginer, je ferais du jdr, pas des gns dans des chateaux. De la même façon qu’au cinéma, si Dogville est surement un très bon film, je n’ai pas envie que tout les films soient aussi dépouillé.

  12. Bonjour
    Je pense que vous ne comprenez pas mes propos : je cite l’auteur sur sa volonté, par le biais du Gn, de vouloir changer les gens et leur perception des autres . On sort clairement du hobby/jeu pour aller dans un combat politique/sociétal .

  13. @ Thepimousse

    Si si je comprends très bien.

    Mais pour moi le GN n’est pas forcément qu’un moment où on pose le cerveau pour aller se réfugier dans des stéréotypes bien fixés.

    Au contraire, c’est un excellent terrain d’entraînement pour y faire voir d’autres versions de la réalité et y JOUER, avec tout ce que ça implique.

    Mais bien sûr ce genre d’expérience de jeu doit être totalement volontaire dans la démarche.

  14. Ouais je sais c’est dur.

  15. Merci Fenriss ! Je me sens moins seul dans le clan des vieux réac, je partage entièrement ta position.

    Je comprends la réaction de ThePimousse. Lors de la présentation du Labo GN 2016 sur le forum attenant à ce site, j’avais questionné la présentation : le féminisme y était clairement présenté et revendiqué comme une valeur fondatrice de l’évènement.

    Oui la manière de jouer n’est pas anodine. Oui elle est facteur de transformation sociale. Pour autant je crois que le GN doit être un outil pour élargir notre pensée, pour nous amener à nous enrichir de questions nouvelles. Je suis beaucoup plus réservé sur les jeux ayant vocation à démontrer, expliquer et convaincre. Car derrière le féminisme se cache des positions personnelles et politiques. J’ai rarement vu deux individus (même si ce sont deux femmes) se mettre parfaitement d’accord sur ce qu’ils mettent comme sens derrière ce mot.

  16. Cire, je ne suis pas du tout d’accord avec “doit”, le Gn ne doit rien. C’est un loisir. Si par le Gn on arrive a faire évoluer les mentalités et faire réfléchir, tant mieux. Mais ce n’est en rien une obligation. C’est ce qui me gène aussi avec l’idée de généraliser les sessions inversé et la non importance du sexe des personnages. Pour reprendre ma comparaison avec le cinéma, je suis ravie de voir de temps en temps des films engagés qui me font réfléchir et font évoluer la société pour autant j’ai aussi besoin de voir des films drôle qui ne se prennent pas la tête, ou des films d’actions qui m’emportent. Parce que le cinéma c’est avant tout un divertissement, tout comme le gn. Bref, autant je trouve fascinant toutes les réflexions que nous apporte le Gn nordique, avec sa façon très sociale de concevoir ses jeux, autant ça doit rester à mon sens une branche du Gn, tout comme le “med’bour” et surement pas devenir la seule voie possible du Gn.

  17. D’accord avec toi, je retire mon doigt… heu pardon, mon “doit”.

  18. En vieux routard du Jdr sur Table, j avais déjà du mal avec les joueurs qui incarnaient des persos du sexe opposé car on tombait très très vite dans la caricature.
    Je fais du GN pour être le plus possible en immersion et me sortir de la réalité. Concernant la question du réalisme, effectivement, tout le monde n’est pas toujours au top dans les costumes mais tant que ca fait illusion ca me va. Après je peux passer pour un sale con mais quand j’avoue éviter au possible les interactions en jeu avec des joueurs dont je trouve les costumes pas du tout en accord avec l’époque ou le thème du GN car ça brise mon immersion…

    Au sujet de jouer des personnages du sexe opposé, j en suis totalement incapable car je ne peux réussir à “penser” comme eux. Mais cela ne se limite pas au sexe, je suis totalement incapable d’incarner une race différente de celle des humains car je n’ai pas le même mode de fonctionnement. Comment incarner un Elfe détaché des préoccupations matérielles ou un nain dépourvu du sens de l’humour… C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles j’évite tout GN de type médiéval fantastique 🙂
    En tant qu’organisateur, je privilégie le casting en fonction des âges et des physiques des joueurs afin qu’ils collent au plus prêt des rôles qui sont écrits et ce pour favoriser l’immersion visuelle de tout le monde.

    Prenons l’exemple du GN “Just a little Lovin” que je rêve de jouer pour différentes raisons. Une d’entre elle est de me sortir de ma zone de confort en jouant une relation homosexuelle avec un autre homme. Si j’ai en face de moi, une femme qui incarne un homme, je sais déjà que je n’aurais pas la même attitude en jeu et que cela ne m’amènera pas sur ce que j’ai précisément envie de vivre…

  19. @Thepimousse : Non, tu as bien compris. j’en suis arrivée à un point de ma réflexion où j’estime que la pratique de mes loisirs doit être en adéquation avec mes idées et mes valeurs. De la même façon que, dans ma pratique de la couture, j’accorde de l’importance à la provenance et à l’impact humain et écologique de mes tissus, je souhaite écrire et organiser des GN qui sont en accord avec mon souhait d’une société égalitaire dans laquelle les discriminations n’existeront plus. Je ne crois pas du tout que les loisirs sont un domaine neutre duquel les réflexions sociales doivent être absentes, puisqu’ils reposent eux aussi sur des modèles sociaux (combien de GN prennent place dans un univers au modèle patriarcal sans que ce modèle soit questionné par les organisateurs ?)

    @Fenriss : Dans la mesure où on s’habitue à tout, je suis persuadée qu’à force de voir des joueurs et joueuses incarner des personnages au genre différent du leur, cet effort d’abstraction que tu trouves aujourd’hui trop dommageable à ton plaisir de jeu, s’amenuisera jusqu’à ce que ça ne présente plus aucun problème. De même que l’habitude de voir des joueurs et joueuses dans n’importe quel rôle diminuera la peur du manque de crédibilité et la dérive vers des comportements caricaturaux. Pour ma part, je trouve que l’entretien de pratiques discriminantes sous le prétexte de mon propre plaisir ou du plaisir supposé de mes joueurs est vraiment problématique.

    Par ailleurs je trouve ça intéressant de noter que cette peur de ne pas être crédible et de jouer dans l’outrance de la caricature est majoritairement exprimée par des hommes. Pour qu’elle diminue, quoi de mieux que de généraliser les occasions de jouer un personnage d’un autre genre et ainsi dédramatiser le phénomène ?

  20. @Fenriss, ton commentaire m’a fait penser aux omnivores qui ont peur que le monde devienne végétarien. Sérieusement ? T’as vraiment peur que soudain tous les GN deviennent dégenrés ou inversés ? J’en doute, franchement. Quelque part t’es plus optimiste que moi 🙂

    @Ollivier : c’est quoi exactement, penser “comme une femme” ?

  21. @Lilaclairence. Sans sexisme aucun, je trouve que les hommes et les femmes n’ont pas le même mode de raisonnement sur pas mal de problèmes donnés. Lorsque j’incarne un rôle, j essaie au maximum de faire disparaitre ma personnalité et je ne cherche plus qu’a être l’ autre pendant la durée du GN. J’y arrive aussi car j’incarne des hommes avec leur mode de raisonnement bien à eux et ce que je ne veux pas avoir à faire en jouant c’est de me dire, tiens je vais réagir comme cela car il me semble que c’est de cette façon qu’une femme réagirait.

  22. @Lilaclairence: Lucie exprime clairement une volonté de faire évoluer son loisir, elle ne parle pas que des jeux qu’elle organise. Donc ma peur est proportionnellement ridicule à sa volonté.

    Perso, j’organise des gns pour faire plaisir aux gens que j’aime bien, pas pour changer le monde. Donc je continuerais à faire comme ça. Peut-être que j’organiserais des gns dégenré ou inversé parce que l’idée me plait et que je serais même curieux d’essayer, mais je continuerais à organiser des gns comme je les organise aujourd’hui car j’aime cette façon de faire et que c’est avant tout comme ça que j’ai envie de faire vivre le gn.

  23. Pierre Henry a écrit “la musique a été beaucoup moins loin que la poésie ou la peinture. Elle n’a pas encore osé se détruire elle-même pour vivre.” Bon… Ça a donné la musique concrète… Chacun ses goûts. Dans le cadre du GN, je conçois tout à fait la démarche artistique de casser les codes. A voir si ça peut donner quelque chose.

    En ce qui concerne la démarche sociétale, forcément respectable, ma vision serait plutôt de mettre en scène les inégalités et injustices. Pour moi, “neutraliser” les personnages revient plutôt à les gommer. Comme si, par exemple, on ne mettait en scène qu’une seule race dans le but de dénoncer le racisme, ou si on supprimait les différences sociales pour exorciser les différences de milieux. Ça me semble beaucoup moins porteur, moins efficace pour passer un message et susciter la réflexion.

    Après, inverser les rôles sexués et/ou permettre à chacun de jouer un personnage de sexe varié a plusieurs inconvénients : tout d’abord, j’ai l’impression ce genre de jeu ne prêche que des convaincus, un peu comme un meeting politique qui, presque par définition, n’attire que des partisans. Ensuite, la couche supplémentaire crée par le fait de jouer un autre sexe dilue le propos en établissant une distance supplémentaire entre le joueur et le personnage. Si je joue un personnage masculin immonde avec les femmes, ça pourra m’interroger sur mon attitude d’homme dans la vie courante. Par contre, si je joue un personnage féminin ainsi malmené, ça restera pour moi ce personnage fictif qui est une victime, et ce d’autant plus si le contexte du jeu est décalé dans le temps.

  24. @Ollivier : Je pense qu’il n’y a pas de façon de penser féminine ou masculine. En tout cas rien qui ne puisse être dépassé par de l’empathie.

    @Moz : En fait, incarner un perso du sexe opposé dans un GN d’inspiration historique c”est pas seulement être confronté à des situations de victimisation. Comme le craint Olivier, c’est aussi être invité à découvrir la psychologie d’un personnage, marqué par son époque et sa condition de femme. Et découvrir qu’en fait c’est juste un personnage qui n’a pas la même histoire qu’un homme, mais qu’on comprend. C’est découvrir ce que ça fait de vivre ça en lisant son ressenti, ses idées.

    En tant qu’orga, ça nous arrive d’écrire des fiches d’un sexe ou d’un genre qui n’est pas le notre. Pourtant, on arrive à s’identifier et à le rendre jouable. Pour moi, c’est le même processus. On revient à l’empathie, qui ne repose pas que sur des situations, mais aussi sur le dialogue avec le personnage qu’on incarne 🙂

  25. Merci Lucie pour cet article, et la netteté de ta prose.

    A mon sens (ça a été dit), tout est une question de réglage, donc forcément subjectif et personnel.

    Je comprends bien et je rejoins, les gens qui ont du mal à (ou juste pas envie dans ce cadre) faire l’effort d’imaginer que ce freluquet de 45 kg est le chef barbare, ou que cette tonnelle est un château.
    Personnellement, ça me fait assez vite sortir du trip, et je réagis de même devant un film, livre ou autre qui serait bâti sur un élément important qui serait bancal ou discutable.
    Le JdR sur table permet à moindre frais d’incarner un personnage “pour lequel on n’est pas naturellement doté”, mais les pratiquants du GN cherchent autre chose je crois, d’où le terme originel “grandeur nature”.

    A l’inverse, je trouverais dommage que, dans le cadre d’un loisir basé beaucoup sur l’imaginaire, soit systématiquement refusée cette incartade, et donc que soit fermée à double tour la porte à ce qui ne parait pas “assez” crédible.
    Ce niveau d’abnégation jugé acceptable dépend de chacun d’entre nous, des compromis qu’on est prêts à faire (naturellement ou en prenant un peu sur soi). Au moins du boulot en amont pour être bien clair sur ce que sera l’ambiance du GN, afin de ne pas mentir aux joueurs, même par omission.

    Un point à ne pas écarter qui il me semble n’a pas été évoqué dans les commentaires, c’est que cette incarnation “malgré les apparences” peut demander un investissement en temps, déguisement, maquillage et surtout préparation supérieur à un rôle disons “normal” (à défaut d’un autre terme). Du coup, les GN comportant un tel casting (homme joue femme etc) risquent d’être tout ou partie réservés de fait à celles et ceux qui peuvent investir un jour de plus pour la préparation ou l’atelier idoine.
    Pour pouvoir être plus ouverts sur l’attribution des rôles, attention à ne pas se fermer sur d’autres critères.

  26. @Matthieu :
    On se rejoint entièrement sur le fait que permettre de jouer un rôle qui demande aux autres un effort d’abstraction supplémentaire revient simplement à un arbitrage de l’organisateur entre liberté des uns et contraintes imposées aux autres.
    En revanche, je ne suis pas d’accord que seuls ceux qui ont plus d’argent ou de temps pourront jouer un personnage de l’autre sexe. M’habiller en femme me coûtera bien moins cher que nombre de costumes d’homme habituels (armures, tenues historiques, uniformes, etc.). Certes, on peut pousser le travestissement très loin, mais il va de même pour une transformation en orc ou en Al Capone.

  27. Si tu es à un niveau telle d’abstraction que les hommes jouent des femmes, je pense que tu t’en fous d’avoir un costume cheap ou purement figuratif. Le propos n’est pas là.

    Ce qui m’apparait évident à la lecture des commentaires, c’est que ce type d’essai nous apprendra des choses. C’est ce type d’initiatives qui fera évoluer / se recycler le GN ; contrairement au GN que je pratique et organise moi-même.

    On peut regarder ça en disant qu’on aime pas, que ça nous fait pas vibrer, mais on peut plus difficilement nier que ça va enrichir les possibilités de jeu. Et amener, sans doute, à d’autres innovations.

  28. Pink, je ne suis pas d’accord sur ce coup : le travestissement peut potentiellement être ridicule, et ça, ça me gène finalement bien plus que l’échange entre les genres.
    Comme pour tout rôle costumé, il y a un investissement nécessaire, en temps, en soin apporté aux détails, éventuellement en argent…

  29. Une seule chose est certaine : le débat ne laisse personne insensible !

  30. Je ne suis pas d’accord : les elfes EXISTENT !!!

  31. Non mais quoi encore ! Je veux bien jouer un Nain, un Elfe, un Wookie, mais pas une femme ! D’abord je ne saurais pas, c’est bien plus facile de jouer une race extra-terrestre ou imaginaire que cette moité de l’humanité au coté de laquelle nous passons notre vie (et de la laquelle nous tenons la vie) en veillant soigneusement à ne pas chercher à la comprendre… car maintenir le statut quo, et donc la domination de notre sexe, avec tous ses avantages, est à ce prix !

  32. Bonsoir à tous,
    J’aurais un exemple tout frais puisque j’ai joué pour la 1e fois un rôle masculin pas plus tard qu’hier, attribué trois jours auparavant. Je félicite Lucie par sa prise de position assertive et courageuse. Merci également à Dandier Steel pour le dernier commentaire qui m’a bien fait marrer. Je me présente, tombant par hasard sur cette discussion en faisant une recherche sur le site pour un prochain GN où je souhaite m’inscrire, et intervenant pour la 1e fois. Je suis une femme qui fait du GN depuis moins de deux ans.
    La question à se poser n’est pas : quel est le sexe du joueur en face de moi ? Elle devrait être : quelles sont ma perception, mon ouverture à l’autre et à ses différences ?
    Le jeu de rôle, c’est pour développer l’imaginaire, non ? C’est pour sortir de soi-même, jouer un autre rôle, non ? Donc sortir de son âge, de son métier, de son origine sociale, de son temps… et pourquoi pas sortir de son sexe ? Sortir de sa zone de confort, dépasser ses peurs, c’est comme cela qu’on progresse, ça apporte au final de la satisfaction ; et le GN est un lieu idéal pour le faire sans prendre de risques trop élevés, même si cela demande des efforts au joueur ainsi qu’aux autres joueurs.
    Et puis le GN, c’est un jeu. C’est par le jeu que nous apprenons plein de choses, souvenons-nous de notre enfance et des personnages que nous incarnions alors, sans moult accessoires ni décor, faisant simplement appel à notre imagination. Pourquoi justement ne pas apprendre à oublier ces stéréotypes qui nous collent à la peau ?
    Je termine en citant l’actrice américaine Whoopi Goldberg : « Je n’ai que trois défauts. Je suis une femme, noire et juive. »

  33. Dandier Steel, la différence entre une femme et un wookie, outre la pilosité, c’est que l’interprétation d’un wookie nécessite juste quelques grognements et une tendance à la violence pour être “juste”. L’interprétation d’une femme par un homme ne peut se résumer, par exemple, à causer de fringues et de maquillage sans tomber dans la caricature ridicule, ce qui n’est pas, du moins je l’espère, ce qui est recherché. Et c’est valable pour une femme jouant un homme, dont les centres d’intérêt se limiteraient au foot et aux bagnoles. Bref, comme le dit Christine, ça demande de gros efforts supplémentaires pour tout le monde, pas obligatoirement couronnés de succès.

  34. Cet article est fort intéressant et soulève un point de vu tout à fait utile.

    Je pense pour ma part qu’il est évident que l’on doit accepter que chacun puisse interprêter le rôle qu’il désire sans contrainte du genre. Ceci pour des raisons qui m’apparaissent triviales une fois que les notions de genre ont été bien saisies.

    Il faut par contre éclaircir quelque peu le débat qui est fort brouillé, y compris par l’actualité “relativement récente” de la “manif pour tous”.
    La “théorie du genre” est une invention des gens dérangés par les conclusions des études de genre. Qu’est ce qu’une étude de genre? On observe les genres dans une société et on décrit les attributs associés de chaque genre. La conclusion dont on en a tiré, c’est qu’il existe une très grande quantités de normes, variant suivant les cultures, les époques, les lieux. Il n’y a donc rien de “naturel” à ce qu’une femme accède ou non au métier des armes, par exemple. Il y a des peuples ou les femmes étaient des guerrières, base du mythe des “amazones”.
    Le genre étant une norme construite, il apparait que l’on peut s’interroger sur la volonté de naturaliser le genre. Quel est l’analyse politique que l’on peut tirer en forcant les femmes, par exemple, à être socialement dominée par les hommes. Pouquoi les attributs des genres sont différents suivant la classe sociale? Il me semble que Bourdieu a écrit sur le sujet. On peut noter en passant la focalisation sur un des attributs d’une des normes de genre d’un groupe d’humain appellé “musulmans” autour du voile et constater qu’étrangement, le voile dérange davantage en Irak qu’au Quatar. Etonnant. Il y aurait de quoi faire un cycle de conférence sur le sujet.

    De la crédinbilité:
    A-t-on besoin d’avoir des seins pour être crédible en femme? A-t-on besoin de poil et de bite pour l’être en homme? Un homme de 43 ans peut-il être crédible dans le rôle d’un enfant de 12 ans? Mon expérience personnelle en improvisation théatrale m’a montré que pour être crédible en maraîcher sur scene, il n’y a pas besoin de houe. Pour être crédible en enfant, pas besoin d’avoir 12 ans. L’imagination est une forme de magie. Parce qu’elle permet de voir ce qui n’existe pas. Vous devriez en faire, c’est enrichissant.

    De la caricature
    Souvent, sur table en tout cas, il y a des hommes qui incarnent des femmes de manière caricaturales. Ce que l’on oublie souvent, c’est par exemple, le roleplay caricatural que l’on observe chaque fois qu’un joueur fait un elfe et un autre un nain, par exemple. Qui n’a pas dit ou entendu des blagues digne de naheulbeuk (qui est très amusant et j’adore, mais totalement et volontairement caricatural) lors d’un tel cas? Pourtant, une elfe des royaumes oubliés n’est pas précisément l’elfette de naheulbeuk! Ca n’empêche pas les blagues de voler, blagues qui ne sont pas crédibles dans l’univers des Royaumes…

    De l’inconfort d’incarner le genre opposé.
    Il est étonnant que l’on considère plus facile d’incarner un elfe agé de 3000 ans (sans tomber dans la caricature) qu’un individu du genre opposé que l’on cotoie généralement tous les jours. Il me semble trivial que l’on percoit très aisément tous les attributs que l’on prête au genre, au contraire d’un elfe. Si vous en croisez souvent, je vous prie de m’inviter sur place, j’aimerais beaucoup en voir un vrai. Ce qui est la cause de la gène n’est en réalité absoluement pas la difficulté technique d’incarner le genre opposé. Un homme qui porte une jupe, c’est une tapette. Une petite fille qui joue à des jeux de garçons est un garçon manqué (sympa pour elle, 4 ans, et déjà considérée comme une ratée…). Un homme dragueur est un “dom juan”, une femme dragueuse est une salope.
    Ce que cet inconfort révèle en réalité, c’est la peur de subir la violence non dite qu’une partie opprimée de la population subit dans un silence lourd de signification. Cette violence qui fait que les “trans” font parti des gens qui se suicident le plus, par exemple. Cette violence qui fait que des homosexuels se font agresser ou même tuer. Cette violence qui fait que c’est une majorité de femme qui subissent des violences conjugales (et que les hommes taisent cette même violence par honte).

    Accepter d’incarner ou de voir incarner un rôle dans un genre opposé est clairement un acte militant. En cela, l’accepter dans le cadre d’un grandeur nature est politique et militant. Certains disent que c’est un loisir et qu’il n’a pas à être politique et militant. Le hic, c’est que refuser de voir un individu incarner un rôle du genre opposé est aussi un acte militant. Un acte militant pour une société violente et sexiste. Ne pas s’engager est un engagement. On ne peut pas rester neutre. La politique, au sens vrai du terme, c’est à dire en excluant les jeux “politiciens”, est partout et en toute chose.

    En conclusion, je pense qu’une bonne pratique est d’accepter dans tous les gns que chacun puisse choisir le genre de son personnage. Parce que, je pense, que les rôlistes sont les plus à même d’avancer contre les exclusions, parce qu’ils ont été exclus et le sont encore (même si cela progresse). Il y a 30 ans, on prenait les rôlistes pour des malades mentaux satanistes… Il faut se le rappeler. Cela devient de plus en plus acceptable d’être rôliste, mais ce n’est pas une raison pour ne pas être solidaires de ceux qui ne sont pas acceptés.

    Rien ne vous impose d’incarner un rôle du genre opposé… Mais vous avez tord de vous priver de la richesse de cette expérience.

  35. très très d’accord avec ce dernier commentaire même si je ne me fais pas d’illusions sur la capacité du monde de GN (une minuscule communauté) à arriver à être une espèce d’avant-garde (re)connue…
    NB: dans le milieu du cosplay, le choix d’un genre opposé (crossplay) se fait sans que cela entraîne des débats et questions existencielles, c’est tout simplement une option “normale”…

  36. Pour rassurer ceux qui nous prédisent un future post-apocalyptique où nous serons tous condamnés à jouer des créatures dégenrées non-immersives:

    – Lorsque la possibilité de jouer le genre que l’on souhaite est donnée librement, très rares sont les joueurs qui en font la demande. Il s’agit en général de gens pour qui cela est important (pour des raisons personnelles et/ou comme pour l’expérience de jeu qu’ils recherchent), et qui font en sorte de le jouer de manière respectueuse et crédible. Donc on ne parle pas de jouer massivement dégenré pour tout (sauf dans un setting qui le justifie comme pour Mad About the Boy)

    – J’ai fait jouer récemment une session complètement dégenrée des Fleurs de Mai, qui a donné des choses très intéressantes également (et n’a en rien rendu le jeu bancal).

    Ce qui me paraît important, c’est simplement que, en tant qu’orga, on puisse se poser les questions suivantes:
    – Est-il indispensable pour le jeu que les personnages soient genrés d’avance? Autrement il est possible de les écrire en genre neutre, et qu’ils adoptent ensuite le genre du personnage. Ah, et vouloir inclure des romances/relations intimes n’est pas un motif qui rend l’attribution d’un genre nécessaire (sauf s’il vous faut un subplot grossesse). Sur Last Will, tous les personnages sont dégenrés par défaut, sauf deux parents “biologiques”

    – Si les personnages sont écrits genrés, est-il nécessaire qu’ils correspondent au genre IRL du joueur, ou est-il possible de laisse le participant choisir. C’est la solution retenue pour le prochain Fearweather Manor, et le choix de jouer en genre inversé ne concerne que quelques individus… sur plus de 140 joueurs.

    – Si le fait de juger qu’une attribution par genre est nécessaire, se demander pourquoi. Si c’est pour être “immersif visuellement”, pensez que vos joueurs peuvent juger s’ils sont à même d’être crédibles à jouer un autre genre. S’ils veulent jouer un autre genre pour l’expérience de jeu (en se considérant une crédibilité possiblement plus faible), pensez à la session en genre inversée. Regardez aussi les attributions respectives des personnages masculins et féminins. Essayez de changez un peu de paradigme.

    – Comme pour d’autres techniques, ce n’est pas du tout ou rien. Vous pouvez dégenrer une partie seulement des rôles pour laisser la possibilité ouverte, et garder certains rôles forcément masculin/féminin

    – Pour finir, l’orga a toujours le dernier mot sur ce qu’il crée, il n’y a pas de raison que ça change. Mais l’argument du réalisme, ou du fait que l'”on a toujours fait comme ça” a ses limites. Chaque orga fait ce qu’il veut, mais ces questions peuvent avoir leur importance (comme de choisir un système de règles ou d’inclure des combats par exemple)

  37. “Le hic, c’est que refuser de voir un individu incarner un rôle du genre opposé est aussi un acte militant. Un acte militant pour une société violente et sexiste.”

    Merci Léa de faire prendre conscience à 90% des orgas et des joueurs qu’ils sont des rétrogrades sexistes, violents, limite des harceleurs, chasseurs d’homos et gros beaufs. Grâce à toi, nous savons quelle est notre place dans la société. Heureusement qu’il y a des gens comme toi, pleins de discernement et de subtilité, pour nous l’indiquer.

    Bon, je vous laisse : j’ai un GN à écrire avec, honte suprême, une histoire d’amour entre deux personnages que je verrais bien être interprétés par des joueurs de sexes correspondants. Et si je manque d’inspiration, j’irai filer des coups de ceinturon à mon fils : j’ai retrouvé une poupée Barbie sous son lit !

  38. @Saki : si le jeu exige un travail de costume pas de soucis. Ce que je veux dire, c’est que jouer une femme en GN ne devrait pas être synonyme de travestissement. Si le jeu n’est pas à 360, pourquoi une jupe ou un accessoire ne suffirait pas à rappeler aux joueurs le genre du personnage ?

    @Lea : “Ce que cet inconfort révèle en réalité, c’est la peur d… ” être mal perçu dans son interprétation et dans ses intentions.
    Exemple : je joue une femme, qui se sert de ses charmes et de ses relations pour atteindre le chef de la mafia et ainsi assouvir la soif de vengeance qui l’obsède depuis l’assassinat de son frère. Ma crainte en tant que joueur sera de laisser planer le doute que je considère ce qui fait le personnage comme une normalité. Je ne considère pas que les femmes ne savent QUE se servir de leur charme pour parvenir à leur fins, mais en l’occurrence ici, c’est ce qui fait la nature du personnage qu’un organisateur m’a donné.
    Autre exemple avec Carmen Chabardes : l’une des premières choses que je me suis dit c’est “si je me plie à l’autorité patriarcale, les joueurs seront ils assez alertes pour comprendre que c’est mon rôle qui veut celà et non, moi, joueur, qui implicitement considère que les femmes doivent toujours donner raison à l’homme de la maison”.

    Je n’ai pas envie de “me priver de la richesse de cette expérience”. Par contre “peut-on tout jouer ?” Ma réponse sera : “oui, mais pas avec n’importe qui”. Et là, pour ma part je regarderais avec attention et retenu le nom des joueurs et des organisateurs concernés.

  39. @Léa :
    Concernant la crédibilité, tu as raison qu’une femme peut être crédible en homme, un homme en enfant et un enfant en troll des cavernes. Cependant, plus il y a de différence physique entre le joueur et le personnage, plus cette crédibilité nécessite un effort d’abstraction de la part des autres participants du GN. Il me semble donc que chaque organisateur est libre d’imposer ou non cet effort d’abstraction à ses joueurs (de la même manière qu’il peut leur imposer de porter ou non un costume). Certes, la nécessité d’arbitrer entre contrainte d’abstraction et liberté des joueurs s’estompe pour les GN plus proches de l’impro, mais elle ne disparaît jamais entièrement, et ça me semble contre-productif de prétendre le contraire.

    Concernant l’inconfort d’incarner le sexe opposé, un joueur peut être mal à l’aise à l’idée d’incarner une femme (ou une rock-star ou un intégriste religieux) parce qu’il estime qu’il ne jouera pas bien ce rôle. Il peut avoir tort ou raison, mais ça ne signifie pas pour autant qu’il craint forcément de subir la violence dont sont victimes certaines femmes. En clair, ce n’est pas forcément “un geste militant pour une société violente et sexiste”.

    Pour élargir un peu le débat, je pense que l’outil le plus efficace contre le sexisme en GN est de permettre à des femmes d’incarner des personnages féminins qui occupent n’importe quel rôle dans le monde du GN, y compris des soldates, des dirigeantes, etc.

  40. Je rejoins à 100% la position, quelque peu agacée et ironique, de Moz.

    Je trouve qu’il y a une forme de violence derrière ces positions politiques qui se veulent mettre un terme à l’injustice.

    D’un côté on déclare que les orgas gardent la pleine liberté dans la création et la réalisation d’un GN et de l’autre on est plein d’obligation : on DOIT lutter contre les à priori sociétaux, on DOIT accepter que les joueurs veuillent jouer le genre qu’ils veulent, on a TORD de ne pas essayer des rôles d’un genre différent, on DOIT faire preuve de plus grande imagination/abstraction etc. C’est pénible et contre productif. Je crois qu’aider à une évolution des mentalités, ce n’est pas opposer, diviser, culpabiliser. Cela fait appel, selon moi, à des méthodes autrement plus subtiles.

    De plus, Léa veut tordre le cou aux à priori, aux archétypes sociétaux et en veut pour preuve un adage usé jusqu’à la corne : “Un homme dragueur est un « dom juan », une femme dragueuse est une salope.” Je crois que ce modèle est largement dépassé depuis plusieurs décennies.

    Derrière ce féminisme se cache en fait un glacial égalitarisme. Oui les hommes et les femmes doivent être égaux en droits. Non, cela ne gomme pas pour autant la question du genre. Bien sur, la question de masculin et féminin est extrêmement complexe. On n’est jamais tout l’un ou tout l’autre, il y a une immense palette de degrés très bien mis en évidence par la science moderne. Mais de là à jeter le bébé avec l’eau du bain et faire appel aux Amazones… Pour des raisons hormonales, biologiques un homme a plus de chance de présenter des aptitudes au combat. C’est ainsi. C’est mécanique, pas sociétal. Ce n’est pas faire insulte aux femmes. La testostérone transforme corps et esprit, c’est ainsi. Oui à l’égalité, non à l’égalitarisme.

    Le seul élément où je rejoint Léa est que de nombreux jeux proposent de jouer des races extra humaines, des êtres immortels ou divins. Bref des rôles 1000 fois plus complexes (dans le sens où il devient complexe de ne pas sombrer dans la caricature et de créer une forme de crédibilité) que jouer un individu d’un autre genre. Pour ma part j’évite ces jeux caricaturaux, tant comme joueur que comme orga.

  41. @Cire : Oui à l’égalitarisme !

    Et jouer un elfe c’est pas mille fois plus complexe, enfin ! Jouer un autre être humain, qui existe en vrai, est pour moi plus difficile que jouer un elfe, qui est un être imaginaire auquel je peux prêter ce que je veux. Ce que dis Pink à ce sujet un peu plus haut est selon moi très juste, cette notion de “ce que je dis de…”

    Quand on pense la société en terme de groupe sociaux (les femmes, les hommes, les noirs, les arabes, les handicapés), on est attentif de l’image qu’on va renvoyer d’un groupe dont on joue un membre, surtout s’il y a systématisme. Est-ce qu’on a raison ou tort de faire gaffe ? Je sais pas, mais ouais c’est plus touchy de jouer un noir quand on est blanc qu’un elfe. Je le déplore, mais c’est comme ça.

    Mon espoir c’est justement qu’en ouvrant la porte, on sorte de cette gêne qui selon moi, n’est pas bonne pour l’humanité. Ouais, j’y vais fort, mais à partir du moment où on considère que c’est plus difficile de jouer un autre humain qu’un être imaginaire, c’est qu’on est dans une société où l’elfe est plus proche de nous que l’autre humain qui existe pour de vrai. Parce que l’elfe, ça fait partie de notre culture légitime, mondialisée, et que l’autre être humain, la société t’a dit qu’il était différent de toi.

    Il faut (haha, il FAUT, allez, obligatoire, comme l’école jusqu’à 16 ans :p ) jouer des rôles de vrais gens différents de nous PARCE QUE c’est inconfortable. Nier l’inconfort pour moi, c’est passer à côté du truc. C’est justement pour ça qu’il faut le faire. Parce que c’est la révolution 🙂

  42. @Muriel : tes propositions sont intéressantes et je pense que ça vaut le coup d’y réfléchir et de les essayer.

    @Moz: “comme le dit Christine, ça demande de gros efforts supplémentaires pour tout le monde, pas obligatoirement couronnés de succès.”
    Oui, je disais que cela demande des efforts mais afin de pousser à en faire plus en général, que ce soit pour lutter contre le sexisme, le racisme, l’égoïsme ou simplement pour progresser soi-même et collectivement, dans son travail, dans sa vie personnelle. Peut-être pas toujours couronnés de succès, et alors? C’est par les échecs qu’on apprend à s’améliorer. Et il y a même des chances que ça réussisse. Je le répète: dépasser ses peurs, sortir de sa zone de confort, comme @lilaclairence le dit également, c’est enrichissant pour soi et pour tous. Prendre des risques, c’est vivre plus intensément et sans regret. Je n’ai pas -encore- joué « Mad about the Boy » mais voici le commentaire d’un homme : « Incroyable, formidable et éprouvant à la fois ». Et au pot Rôle hier tous ceux que j’ai rencontrés, hommes et femmes, ont dit être ravis de l’avoir fait même si c’était pas évident.
    Autre exemple, sympa et peu éprouvant, mon rôle de samedi dernier en homme en murder: C’est la 1e fois qu’on m’attribue un rôle masculin. Et ce 4 jours avant la murder. Le personnage, de par ses actions et ses motivations, m’apparaissait plus crédible s’il restait masculin, car l’orga m’avait laissé la possibilité de féminiser la fiche perso si j’étais mal à l’aise. Je ne me suis pas grimée ; j’ai pris des vêtements masculins. J’ai joué un personnage avant tout. J’ai axé mon jeu sur le métier-passion du personnage en prenant les symboles de ce métier et en jouant dessus. Il n’y a eu aucun problème avec les autres joueurs qui n’étaient pas au courant avant le jour de la murder. Deux n’avaient jamais fait de murder.

    @Hoog: tout à fait d’accord. Pour faire avancer l’égalité homme femme, créer des rôles de femmes loin des stéréotypes que la société leur attribue, des femmes fortes, agissantes et leaders, c’est une excellente initiative.

    Pour conclure, arrêtons d’avoir peur, tentons de nouvelles choses ! Osons !
    S’il y a des personnes pour râler face à l’innovation, il y en aura toujours, tant pis pour elles si elles préfèrent passer du temps à râler plutôt que de faire quelque chose qui les intéresse.
    Quant à ceux qui veulent rester dans leur zone de confort, en tant que joueur ou orga, cela ne sert à rien de s’opposer stérilement. Chacun fait ce qu’il souhaite, l’important c’est de réfléchir pour comprendre l’autre, ses valeurs et ses intentions, sans le discréditer . Le respect de l’autre c’est la base de relations harmonieuses. Celui des règles du jeu posées au départ dans un GN, c’est la base d’un GN harmonieux qui fait plaisir à tous.

  43. Il est bien entendu que chacun peut jouer ou organiser comme il le désire. Maintenant il faudrait peut-être un peu comprendre que ne pas désirer jouer un personnage de l’autre sexe, ou ne pas désirer en faire jouer une son GN n’est pas obligatoirement un signe de sexisme rétrograde ni un confinement dans la zone de confort, mais juste une question de goût. Je n’ai pas envie de faire du Mass-Larp, alors je ne m’inscris pas sur de tels jeux, pas plus que je n’en organise, point. Donc arrêtez de prendre les autres pour au mieux des blaireaux confortables, au pire des fachos. Une analogie me vient à l’esprit : les végétariens. Il y a ceux qui affirment leur bonheur, leur équilibre, et ceux qui traitent les omnivores de monstres sanguinaires.

    Donc je ne vois aucun souci à ce que vous trouviez une sorte de dépassement, de voie de progression dans des personnages inversés ou asexués, mais il y a d’autres moyens, à la fois de dépasser ses limites en GN, et de traiter de problèmes de société, d’égalité, d’oppression.

    Et, pour info, il n’y a pas vraiment d’innovation. Ca fait plus de 30 ans que l’on peut jouer sur table des personnages de l’autre sexe. Et ça fait 20 ans que Clepsydre propose des GNs dans le monde de Brume, une civilisation au sein de laquelle le féminin est le genre prédominant, avec des contraintes allant jusqu’au langage, à savoir l’utilisation du féminin à la place du neutre “Elle pleut aujourd’hui, elle se fait tard, etc.”

  44. @MOz: Elle me paraît opportune de te remercier d’exprimer franchement ton ressenti dans le premier paragraphe, de développer les autres moyens évoqués dans le second et d’avoir publié les infos sur Clepsydre du dernier paragraphe, car je ne suis ni spécialiste du jeu de rôles sur table ni du GN, simplement curieuse. Est-elle possible de demander l’autorisation de réutiliser le terme “blaireau confortable”, notamment dans d’autres situations ne se rapportant pas au GN, car j’apprécie les nouvelles expressions, surtout celles qui sont marrantes?
    Le jeu de rôles sur table est un lointain souvenir enfantin peuplé d’elfes, de nains où en effet je ne me posais pas la question du genre mais plutôt de tuer les orques et de trouver les trésors.
    Elle est vraie que j’exprimais des opinions que je souhaitais plus larges que la question du genre en GN et du GN, quand elle était question de la zone de confort et d’innovation. Elle est pertinente de remarquer que rien ne vaut une bonne discussion à l’oral, parce que l’écrit laisse place à de trop nombreuses interprétations.
    Elle se fait tard, elle est temps de vous souhaiter une bonne soirée… à toutes les personnes du genre masculin et à tous les individus de sexe féminin.

  45. @Moz : En fait, les anti-spécistes qui traitent les omnivores de tueurs sanguinaires sont plus logiques que les végétariens qui disent que c’est leur mode de vie. Si t’es anti-sexiste et que tu dis aux mecs qui battent et tuent les femmes que “chacun ses choix, hein, tout le monde a le droit de vivre comme il l’entend”, beh c’est bizarre.

    Sur le fond et la forme :

    Je suis d’accord qu’il y a d’autres façons de combattre les inégalités et les représentations sexistes que l’ouverture des rôles à tous les genres 🙂 Je n’aime pas non plus l’idée de dire “si tu fais pas comme nous, t’es contre nous”, ça tue les initiatives et la créativité.

    Par contre, j’ai lu des trucs comme “glacial égalitarisme”, “théorie du genre” et autres joyeusetés.

    La question des moyens de combat est pour moi moins importante que la question du combat elle-même. En gros, je préfère quelqu’un qui dit “je suis d’accord avec le fond, mais j’ai du mal à imaginer un jeu avec des hommes jouer par des femmes parce que 1/je suis pas prêt, 2/y’en a qui aiment, 3/j’ai piscine.” Avec eux, je peux discuter, je sais qu’on va dans le même sens même si on a pas les mêmes envies concrètes. Avec ceux qui discutent le fond, j’ai plus de mal.

  46. En gros, pour rester dans l’analogie, qu’un antispéciste soit végétarien, végétalien ou vegan, je l’aimerais toujours plus qu’un spéciste.

  47. Moz il me semble que mettre sur le même plan quelqu’un qui ne veut pas jouer un personnage d’un autre sexe, ce qui n’engage que lui, avec un orga qui refuse qu’un de ses joueurs joue un personnage d’un autre sexe n’est pas très approprié. Dans le 2e cas, cette “question de goût” selon tes termes a un impact sur quelqu’un d’autre.

    Je pense qu’il y a une posture générale (et encore) sur le sujet, mais qu’en réalité il y a plein d’orgas qui accepteraient s’ils étaient confrontés à quelqu’un qui leur demande explicitement s’il peut jouer un rôle d’un autre sexe (ce qui arrive rarement). Parce qu’alors ça deviendrait une demande concrète de quelqu’un pour qui ils peuvent avoir de l’empathie et comprendre les raisons. Et pour ceux qui continuent de refuser face à quelqu’un qui leur fait la demande, alors oui je pense qu’à un moment il faut assumer le fait que l’on fait des choix qui font souffrir des gens (même si c’est léger) sans se cacher derrière une “question de goût”.

  48. Pas du tout d’accord.

    A l’inverse, une personne qui souhaite jouer un autre genre, sans, en plus, se grimer, impacte par ses choix bien au delà de sa petite personne. Il met les autres joueurs face à son choix : “je joue un autre genre et en plus je ne veux pas me grimer parce que j’assume pleinement la nécessité d’abstraction dans un GN”… “et si ça ne vous va pas c’est que non seulement vous êtes d’obtus sexistes mais en plus vous empêchez une révolution culturelle en train de se propager dans le monde du GN”.

    Perso, je fais du naturisme. Est-ce que pour autant je me ballade à poil dans la rue ? Non. Car je sais que si moi j’ai travaillé la question de la nudité, il n’en est pas de même pour tout le monde.

    Bref si un orga est ok avec la pratique de jeu trans-genre, il est indispensable à mes yeux qu’il l’indique à l’ouverture des inscriptions. C’est un “contrat” minimal, une communication nécessaire. Perso, j’irai voir ailleurs et laisserai ceux qui le souhaitent s’amuser de la sorte.
    Comme Moz, je fais des choix. Telle est ma liberté. Je ne fait pas de mass-larp et je choisis les jeux qui m’intéressent. Ce que je recherche dans le GN ne correspond pas à ce que je lis sur cette page. Je recherche une immersion la plus forte possible, une illusion à 360° la plus aboutie possible, des psychologies à taille humaine (dans toutes leurs complexité), une cohérence du propos et de la mise en situation etc. C’est une question de goût. Ce n’est pas une question d’ouverture d’esprit ou de progrès social… C’est là où le mélange que vous tentez d’imposer comme norme trouve ses limites, même si un jeu conditionne bien des choses, il n’en demeure pas moins un loisir. Je ne vais pas au ciné pour voir des films de société. C’est un choix. Cela ne veut pas dire que je me fout de ce qui se passe dans le monde et/ou notre société.

    Je crois au final qu’il y a une forme de fascisme dans vos théories : vous simplifiez, stigmatisez et imposez vos choix sous prétexte que vous savez mieux que les autres ce qui est bon et utile pour tous. Une sorte de despotisme éclairé…

  49. @Vincent :
    Personnellement, ça ne m’a jamais posé de problème que quelqu’un joue un personnage du sexe qui n’est pas le sien sur des GN où j’étais orga ou joueur. Et je suis d’accord que ça peut faire chier ceux à qui on refuserait cette possibilité. Mais les gens à qui on impose un effort d’abstraction, ça peut aussi les faire chier, et ce sans sexisme aucun.
    Donc je pense qu’il faut vraiment arrêter d’opposer les gentils progressifs d’un côté et les méchants réactionnaires de l’autre. Le travestissement des joueurs, c’est un curseur parmi d’autres, et ça peut très bien être une question de goût/préférence plutôt que de frilosité ou de sexisme.

  50. Fachisme quoi. Carrément.

    En fait, je me rends compte qu’on en revient toujours au même point : à qui on veut faire plaisir ? est-ce qu’on veut, nous orga, être contents du rendu esthétique de notre GN ? est-ce qu’on veut que les joueurs soient confortables, immergés dans un cadre qui ne les questionnent pas et dans lequel ils n’ont pas à réfléchir au genre des gens en face d’eux ? est-ce qu’on veut que celleux qui veulent endosser un rôle qui n’est pas du même genre qu’eux le puissent ?

    Je suis entrain d’écrire un jeu sur l’amour. Dedans, il y a beaucoup de rencontre. En gros, les personnages rencontrent des personnages qu’ils ne connaissent pas. Le genre est un souci, parce que si ton personnage ne connait pas l’autre en face, et que ce dernier est travesti/ou dégenré, comment tu t’adresses à lui/elle ? Je sais que ça risque de poser problème, et que certains joueurs préféreront donc certainement être castés dans des rôles qui correspondent à leur expression de genre.

    Du coup, j’ai réfléchi à un tag qui indiquerait “cette session est composée uniquement de personnages correspondant à l’expression de genre des joueurs”, ou encore à un code pour signifier qui jouera un personnage différent de son expression de genre (même si je suis pas très à l’aise avec l’idée du code couleur “trans”)…

    Ce jeu comporte une mise en scène très forte, des personnages complexes, des costumes, une illusion à 360. Il y aura des ateliers pour que les joueurs s’habituent les uns aux autres en tant que personnes, et pas en tant que personnages. Qu’ils s’acceptent dans leur complexité et leur identité. Comme ça, une fois lâchés dans le jeu, ça sera plus fluide.

    Bien sûr je me suis pris la tête parce que c’est important pour moi, de la même façon que je sais que ce jeu ne coûtera pas plus de 30 euros parce que c’est important pour moi. Ou que les personnages ont des noms qui évoquent plusieurs groupes ethniques, parce que c’est important pour moi. On écrit des jeux qui nous ressemblent.

    Ecrire un jeu où les genres sont fixes, si c’est ce en quoi vous croyez, si c’est l’image que vous voulez transmettre, faites le. Si c’est pas ce en quoi vous croyez, y’a d’autres chemins possibles. Pour moi, cet article est surtout là pour se dire “et si moi je veux faire autrement, j’ai le droit ?” Non seulement tu as le droit, mais tu as notre soutien, à Lucie et à moi, et on veut bien parler d’ateliers pré-GN avec toi pour que ça se passe bien.

    Un GN, c’est une rencontre entre des humains. Je préfère organiser une rencontre entre des gens qui sont prêt à sortir de leur zone de confort à ce niveau là, parce que c’est les GN qui me plaisent. ça veut pas dire que je méprise tout les autres GN du monde. ça veut pas dire non plus que je les méprise pas. ça veut juste dire que je fais des GN qui me plaisent. ça veut pas dire non plus que les gens qui sortent pas de leur zone de confort là dessus sont des gros sexistes.

    et ça veut pas dire que je suis une fasciste. Je propose une forme artistique et ludique qui me correspond, que j’anime autour de valeurs qui me sont chères. Je n’impose une participation à personne. Je n’envoie personne au Goulag pour ne pas s’être inscrit. Je ne monte pas de parti politique visant à exterminer les gens qui ne sont pas d’accord avec moi.

    Par contre, dire “il est indispensable qu’un orga qui pratique le cast trans-genre le signale”, pourquoi ? Si ça va poser des soucis précis comme dans le jeu dont je parlais plus haut, ok, mais si c’est un jeu normal ? Pour prévenir les gens qui sont pas à l’aise avec les trans que ATTENTION, y’en a sur le jeu ? Tu te rends bien compte ici que c’est pas très bien de faire ça, non ? J’ai pas envie d’aller dans le sens des gens qui sont dérangés par l’idée qu’il y ait un trans ou un genderfluid sur leur jeu.

    De la même façon que j’ai pas à signaler à des omnivores que sur ce jeu, désolée, on tuera pas d’animaux.

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