MASS LARP

Publié le vendredi 24 avril 2015 dans Articles,Slide

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Le coupable idéal

Qu’on l’accuse de tous les maux et qu’on le vilipende ou qu’on l’encense et le prenne en exemple, le mass larp laisse peu de GNistes indifférents. Le terme même s’est banalisé, au point de devenir un énorme mot valise où chacun déverse ce qu’il y projette.

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Crédit photo : TELOB

Je vous propose donc de décortiquer cette valise pour mieux nous rendre compte de ce qu’elle contient et, accessoirement, ce que j’y projette.

Medbour

Le terme mass larp semble toujours véhiculer avec lui des relents de Seigneur des Anneaux et autres Conan, à tel point que mass larp et med-fan en deviennent presque synonymes.

Le fait est que les différents mass larp existant proposent presque exclusivement des univers med-fan. Chose aisément compréhensible dans la mesure où le but est de mobiliser le plus largement possible, autant taper dans la culture dominante. Nul doute que d’autres thèmes viendront bientôt concurrencer ce modèle.

En attendant, la pratique du mass-med-fan semble se réduire, aux yeux des observateurs extérieurs, à une immense mêlée, le fameux combat de masse. Et ce n’est pas tout à fait faux, en fonction des règles, du style de jeu, du scénario et des envies des joueurs. L’instinct naturel de compétition trouve dans ces affrontements gigantesques un exutoire salutaire.

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Une erreur possible à mon sens, consisterait à rajouter des objectifs compétitifs pour les joueurs,  tout en se basant sur une règle du jeu incitant à la compétition.

“GN de masse !”

En passant par la traduction française, on croirait presque entendre une injonction à jouer, beuglée par quelque démiurge organisateur. Un second regard nous convainc rapidement que le terme “mass” fait référence à une quantité, un truc énorme avec des milliers de joueurs, ce qui est parfois le cas.

Seulement, à partir de combien de joueurs passe t-on du larp au mass larp ? 200 ? 500 ? Riche débat en perspective. On se rend déjà compte que le terme est impropre à désigner une réalité variable, et comme souvent, plus complexe qu’il n’y parait.

Il n’en reste pas moins que la foule, et a fortiori, la grande foule, a tendance à renforcer le sentiment d’immersion du joueur dans un monde fictif. Des centaines et des centaines de personnes servent de figurants à vos tribulations, et vous-même êtes le figurant de la plupart d’entre eux. La ville prend corps et vous immerge littéralement.

Passe ton back d’abord

Le fait de faire jouer beaucoup de monde pose immédiatement la question “qui crée les personnages ?”. Subséquemment nous pourrions nous demander “ à partir de combien de personnages créés les rôles sont-ils moins intéressants ?”. Voilà ce qui peut définir le Mass Larp : il commence là où s’arrêtent les capacités des organisateurs à écrire des rôles.

C’est donc le joueur qui, sortant de son confort habituel, se prend par la main et se crée son personnage, très souvent en interaction et avec l’aval de l’organisation et en concertation avec les membres du futur groupe de joueurs. La démarche est responsabilisante pour le joueur qui (généralement) a moins tendance à venir se plaindre derrière.

Mais si le mass larp, c’est “du GN où les joueurs créent leurs personnages”, peut-il  y avoir des mass larp à 3 joueurs ?

Camping paradise

La notion de quantité de “mass”, peut également s’appliquer à une durée du jeu,  plus importante que dans les GN “classiques”, à savoir de 4 jours à une semaine. Les rapports au temps qui passe, au temps qu’il fait et au campement sont tout de suite bien différents, et cette contrainte est bien entendu intégrée dans les plans des organisateurs ; “comment occuper les joueurs pendant 4 jours !”.

Le réflexe bien légitime, qui a au moins le mérite de soulager la conscience, est de balancer tous azimuts un maximum de quêtes et de donjons, plus ou moins formatés. L’ambiance peut alors rapidement tourner au MMORPG, avec séances de farming, guildes, instances, etc. Les joueurs repopent pour aller fragger des mobs ; ça fait mal au Role Play.

Dans le mouton tout est bon

Ne rien avoir à faire en GN ça peut arriver. C’est d’ailleurs systématiquement l’organisation qui est pointée du doigt dans ces cas là (d’où son désir de colmater les brèches). Dans de rares cas cependant, les joueurs se prennent en main et développent du jeu sans aucune intervention de l’organisation. Le vide scénaristique est alors générateur de jeu. L’angoisse de tout orga normalement constitué : ne plus savoir ce que font les joueurs !

Ce vide, les orgas pourraient presque l’apprivoiser, et en faire une intention de Jeu : “nous fournissons le terrain, le thème, le cadre, la situation de départ ; montrez-nous ce que vous avez dans le bide !”. Les joueurs sont responsables de leur jeu, et par conséquent de celui des autres, puisqu’ils sont en interaction.

Le matière noire

Elle existe et on ne la voit pas, la relation libre entre joueurs, la rencontre entre personnages auto-créés et révélés à eux-mêmes dans ce premier face à face RP. Peu à peu, là où il n’y avait rien d’autre qu’un projet de jeu, mille histoires démarrent et le vide n’est qu’apparent.

Les meilleurs moments de  RP peuvent survenir dans ce contexte. Pour les joueurs ce sont des moments fondateurs de leurs personnages et des relations qu’ils développeront avec les autres personnages et avec le monde de jeu ; ça se cultiverait presque.

Pour conclure

Le seul invariant à ce jour apte à définir le mass larp, c’est que les personnages ne sont pas écrits par les orgas mais par les joueurs. Finalement, le terme “mass larp” n’est pas si inapproprié que cela (surtout en l’absence d’une meilleure proposition), il y a simplement plus à en dire qu’il n’y parait.

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Cédric LHOMOND

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9 réactions à MASS LARP

  1. Je ne suis pas d’accord avec ta conclusion.

    y’avais eu un débat intéressant aux GNiales sur ce sujet.

    un GN a 500 joueurs ou plus ou les background sont fournis par les orga tu nomme ca comment ?
    (ca s’est déjà fait)

    Un GN a 500 joueurs ou une aprtie des roles est ecrite par les orgas et l’autre partie ecrite par les joueurs et validée/modifiée tu appelle ca comment ?

    A mon avis, le terme mass larp s’applique aux GN ou il y a “beaucoup” de monde

    la limite se situe ou ? 400 ? 500 ? 600 ? 742 ?

  2. Salut Cédric,

    Comme l’a dit Karuna la problématique de définition du mass-larp a été le premier sujet abordé en introduction de la table ronde que nous avions animé lors des dernières GNiales, ou j’avais déjà pointé le côté foure-tout du terme que tu pointe également ici.

    Autant il était à mes yeux nécessaire d’avoir une définition commune pour le temps des débats, globalement admise par tous les participants, pour être “surs que l’on parle tous de la même chose”, autant j’ai du mal à croire à l’établissement d’une définition admise universellement et établie sur la base d’un critère (objectif) unique. Comme pour les termes tels “GN” ou “Art” (une vielle marrote ici-bas 😉 ) j’ai la conviction que les définitions de chacun sont subjectives et que l’emploi de l’une de ces définitions subjectivise nécessairement les échanges sur la base de cette définition.

    Je comprend totalement ta proposition de définition du mass-larp sur la base du critère “du GN où les joueurs créent leurs personnages”. Je pense que c’est une vision qu’une majorité des joueurs français de mass-larp partagent (en tout cas c’est mon ressenti des échanges lus sur le forum des Chroniques de Kandorya). C’est un critère qui offre le double avantage de se présenter comme objectif et binaire à la fois : “Soit les organisateurs rédigent un background et me l’envoient, Soit les organisateurs m’informent que c’est à moi de le rédiger.”.

    Mais malheureusement ce qu’est (ou plutôt ce que peut être) un background est tellement vaste (encore un terme dont la définition est subjective 😉 , et d’intention de jeu qu’ils peuvent impliquer de la part des scénaristes ) et peut tellement varier d’un jeu à l’autre que je vois plus ce critère comme une échelle de valeur plus qu’une donnée binaire. Pour reprendre le paradigme proposé par Electro-GN avec la Table de mixage du GN ( http://www.electro-gn.com/table-de-mixage-du-gn ) on est clairement ici sur le curseur “Création de personnage” dont les 2 extrémités sont “Organisateur” et “Joueur”.

    Peut-être que le GN (en tout cas en France) est allé “globalement” dans la direction de la “Création de personnage” laissé au soin des “Organisateur” au point que cela devienne aujourd’hui une forme de norme à laquelle les mass-larp resteraient réfractaires (que ce soit par choix assumé ou par constat d’impossibilité technique de la mettre en oeuvre, par manque d’effectif pour rédiger un tel scénario ^^). Mais si les mass-larp sont définitivement à fond sur le côté “joueur” du curseur “Création de personnage” de nombreux jeux (même en France) sont encore nuancés et laissent parfois une belle part aux propositions et suggestions des joueurs dans la création de leur personnage / groupe.

    Un exemple parmi d’autres : j’ai envoyé cette semaine mon inscription en ligne pour le GN “Académie Sith” de l’asso GIGN ( http://gi-gn.org/gn-academie-sith-presentation/) , sur le formulaire il figurais en champ texte (parmi d’autres questions plus spécifiques à la backstory de l’univers de jeu) :

    – “Décris ton rôle et ta position dans ta faction : *
    Eléments factuels qui permettront à l’orga scénar d’intégrer tes envies et de déterminer ton rang”

    – “Décris ton perso en quelques mots (origine, expériences, tares, …) : *
    Eléments factuels qui permettront à l’orga scénar de personnaliser ton background”

    Ce à quoi j’ai répondu par un texte de 7617 caractères qui constituent une véritable proposition de background (ou un premier jet à enrichir). Bon après j’ai précisé aux orgas que c’était plus un exemple “du type de BG que j’aimerais bien jouer” que m’avais inspiré le lecture des docs de la backstory de l’univers de jeu mis à disposition des joueurs par leurs soins : Je les laisse piocher ce qu’ils veulent dedans comme bon leur semble pour rédiger le BG final que j’aurais sur ce jeu.

    Et ici on est sur un jeu de “40 Personnages Joueurs et 15 Personnages Non Joueurs” donc très loin d’un mass-larp si on suit une définition uniquement basée sur des questions de volume.

    De plus comme tu peut le voir dans leur présentation / déclaration d’intention on est sur ce jeu en termes de déroulé scénique et scénaristique assez éloigné des formes et contenus proposés en mass-larp.

    Bref, c’est mon analyse subjective, mais je pense que le sujet que tu soulève ici est est celui de la “Création de personnage” par l’ “Organisateur” ou le “Joueur” un sujet qui est loin d’être spécifique et cantonné aux mass-larp.

  3. Et pour que tu ne reste pas sur ta faim je vais te donner ma propre définition subjective de ce qu’est un mass-larp (celle que j’ai présenté à la table ronde des GNiales) mais que je n’ai pas du tout l’intention de faire reconnaître comme définition universellement admise par tous :

    Pour moi un mass-larp c’est (avant tout) un GN ou peuvent cohabiter des joueurs issus de différentes cultures de jeu, venant jouer avec différentes attentes, souvent compatibles mais parfois opposés. Un GN ou tous les participants viennent chercher des choses différentes, comprennent que d’autres participant ne viennent pas y chercher les mêmes choses qu’eux et (surtout) respectent cet état de fait. Un GN ou au final tous les participants peuvent “trouver leur compte”, trouver dans le jeu ce qu’ils y recherchent (ou au moins on essaye ^^).

  4. Pour moi, le terme “mass” s’impose à partir du moment où juste le nombre de participants présents suffit à te plonger dans une immersion totale. A partir de quels nombres de participants, cela devient immersif rien que par le nombre, je suis incapable de le dire mais on doit être proche des 400/500 selon mon expérience. On pourrait même reformuler la question de cette manière si on voulait être plus précis : A partir de combien de participants au mètre carré cela devient immersif rien que par le nombre ? Mais là c’est encore plus flou car il y a plein d’autres éléments qui viennent modifier l’appréciation.

    Après le mécanisme de jeu qui fait que c’est le joueurs qui créent son personnage est une des caractéristiques communes des mass-larp actuelles mais ce n’est pas une obligation. D’ailleurs, ce mécanisme est de plus en plus reprit par des GN qui sont de tailles plus “classiques” et ce n’est donc plus l’apanage des mass-larp.

    Mais finalement ce débat n’est que l’intellectualisation d’un concept au final relativement simple : Beaucoup de joueurs qui jouent ensemble… :p

  5. Franchement j’ai vécu des immersions totales à 10 comme à 50, cela n’a strictement rien à vor avec le nombre mais bien avec la qualité de l’organisation, des ressorts ludiques, du décor, des personnages…

    Bien entendu, c’est reproductible à 500 ou mille. Cela nécessite d’autant plus de travail pour les organisateurs, scéanristes, décorateurs, personnages non joueurs… La question importante me semble donc bien plus la QUALITE du GN que sa TAILLE.

  6. Et bien entendu, il y a une question économique dans la question mass-larp. Economie d’échelle, usage de l’argent collecté, profit.
    C’est pas nouveau, mais comme d’habitude, en parler, c’est sale.
    “Ton corpus change, ce n’est pas sale” disait le Doc…

  7. J’ai toujours du mal avec le lexique des “spécialistes” : exemple de cet article ” L’ambiance peut alors rapidement tourner au MMORPG, avec séances de farming, guildes, instances, etc. Les joueurs repopent pour aller fragger des mobs ; ça fait mal au Role Play.”
    ça fait surtout mal à l’ouverture et à la clarté…
    C’est une tendance un peu trop répandue sur les articles publiés sur ce site. Cela conduit selon moi à fermer un peu plus l’univers du Grandeur Nature et le rendre illisible pour les non initiés sur-diplômés en lexique “Geek”. C’est dommage.

  8. Salut 🙂 En l’occurrence, l’emploi de ces termes spécialisés illustrait le fait que des joueurs parlaient comme ça durant le GN et que ces termes ne viennent pas du jeu de rôle grandeur nature mais du jeu vidéo.

  9. ok, je ne l’avais pas compris comme cela ! merci de la réponse.

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